Cultivons nos différences

ATYPICAL de Robia Rashid

« Une série originale, douce-amère, sensible et délicate, remplie d’amour et d’humour ». Par Sabine Komsta

Les aventures très touchantes de Sam Gardner, un lycéen de 18 ans ayant un trouble du spectre de l’autisme, en quête d’amour et d’indépendance. Sam est un véritable expert des pingouins en Alaska, mais pour ce qui est des actions et réactions les plus banales pour les autres, il est toujours extrêmement démuni… Tout au long de cette série, on vit les sensations d’étrangeté, de malaise de Sam dues à son handicap avec une rare acuité. Quand son copain Zahid le relooke en lui conseillant un perfecto, sa souffrance démesurée devant le simple bruit du zip est parfaitement bien illustrée. On ressent et comprend comme les sons et événements venant de l’extérieur peuvent être amplifiés et devenir insupportables. Toute sa famille lutte à sa façon pour lui faire une place parmi le monde des normaux. Sa mère le surprotège, son père a du mal à trouver son rôle, à établir un lien. Sa sœur oscille entre exaspération, fatigue de porter la responsabilité de son frère, et immense tendresse. Sa psy accompagne les étapes comiques et douloureuses de son quotidien. Son meilleur copain, personnage irrésistible, le coache à sa façon désinvolte et burlesque. On quitte vraiment à regret cette série pertinente et attachante. Une petite pépite à voir sur Netflix.

SIBEL De Cagla Zencirci et Guillaume Giovanetti

« Un hymne magnifique à la différence porté par une héroïne inoubliable ». Par Sabine Komsta

Sibel trace son chemin à mains nues, libre et rebelle dans un village retiré de Turquie où les femmes sont soumises aux traditions dans une société patriarcale. Si un langage ancestral étrange, sifflé, est encore utilisé pour y communiquer, ce sifflement est pour Sibel le seul moyen de communiquer car elle est muette. Son handicap la tenant à l’écart de la vie du village, il lui donne en revanche une liberté qu’elle prend à bras le corps, son fusil en bandoulière, arpentant sans relâche forêts et montagnes où elle règne, souveraine. Ses yeux verts remplis de fougue impétueuse, son regard tour à tour farouche et indomptable, Sibel s’affranchit des lois de ceux qui la rejettent par superstition à cause de son handicap. Elle a l’habitude d’endurer, de résister, alors elle refuse de se soumettre. Dans son maquis, elle protège un homme en fuite, prend soin d’une paria. Elle traverse ce film comme elle traverse dans les dernières images le village, avec une grâce infinie. Son visage fier et insolent brave l’opprobre des villageois. Elle porte sa différence comme un étendard majestueux d’émancipation et de liberté.

LA MELODIE DU BONHEUR de Robert Wise.

« Un film à découvrir ou revoir différemment, et s’ouvrir à toutes les différences » Par Julie Judd

C’est le printemps, ça y est ! On se fait du bien, on regarde « la Mélodie du Bonheur » ! Redécouvrir ce film a été une joie immense et une évidence. Ce film a été oscarisé et impeccablement réalisé avec une musique somptueuse et des acteurs merveilleux en 1965.

Pourquoi revoir ce chef-d’œuvre aujourd’hui ?

Tout d’abord pour vivre un pur moment de bonheur à vous offrir à vous-même mais aussi à vos proches ! C’est le printemps, et je cherchais un film qui puisse résonner avec le renouveau du moment où tout renaît dans la nature. Jacques Lourcelles dans son dictionnaire « subjectif » du cinéma dit de cette œuvre cinématographique majeure : « on a le plaisir de saluer dans ce film la conjonction rarissime d’un immense succès mondial et une complète réussite artistique ». Et il a raison. Actuellement concernée comme beaucoup par le changement climatique et la menace planante d’une troisième guerre mondiale qui sont les défis de notre société actuelle, j’ai été interpellée par le fait que ce film a pour toile de fond la montée du nazisme. Tout en dénonçant le totalitarisme, cette œuvre de fiction basée sur une histoire vraie, nous enseigne la joie, l’amour et le courage. Et comment, en réponse au chaos, penser avec son cœur. La seule façon de nous sauver. Et c’est la leçon de ce film, se remettre à penser avec son cœur… Respirer avec lui et se tourner vers la vie. La scène d’ouverture du film est une véritable déclaration d’amour à la terre. Pouvoir regarder le monde avec des yeux d’enfant émerveillé par la beauté qui nous entoure. Cela nous donne immédiatement envie de partir de la ville et de nous fondre dans la nature. Sensation merveilleuse dont on s’éloigne si facilement dans nos vies citadines.

Un monde formaté

Le personnage de Maria, incarné avec un talent éblouissant par l’extraordinaire actrice Julie Andrews, évolue dans un monde religieux tout au début du film. Mais c’est un monde fait de hiérarchie avec ses codes et ses obligations, ses contraintes. Exactement comme la société dans laquelle nous évoluons puisque nous subissons les dictacts de la société. Et pour la plupart d’entre nous, notre éducation de contraintes nous a formatés à respecter tout cela bien plus que notre propre liberté intérieure. Des lors, l’identification se fait très facilement avec cette jeune femme si drôlement audacieuse pour une aspirante religieuse. Celle-ci se retrouve plongée dans l’inconnu lorsqu’elle est renvoyée de l’abbaye pour aller s’occuper des enfants d’une illustre famille dans la ville de Salzburg. Elle n’a aucune idée que son renvoi est en fait la meilleure chose qui pouvait lui arriver. Pourtant elle doit affronter sa peur, faire face à un monde qu’elle ne connaît pas, se jeter dans l’inconnu, être confrontée aux troubles qu’elle va ressentir avec un homme. Son attitude est incroyable. Elle décide d’improviser d’instant en instant avec la certitude chevillée au cœur que tout ira bien ! Un clin d’œil pour beaucoup de gens, qui se demandent quand tout s’écroule au milieu d’un changement majeur de vie, comment faire face ! Cette œuvre artistique nous donne la force de regarder le changement comme une bénédiction et non plus juste comme une épreuve terrible. « L’épreuve » se transforme en aventure magique et en chemin initiatique.

Ce film nous reconnecte également avec notre créativité. Les enfants de l’illustre famille Von Trapp n’ont pas le droit de jouer parce que leurs vêtements sont trop beaux pour être abîmés. Maria va alors réfléchir et transformer de vieux rideaux en vêtements de jeux qu’ils auront le droit de salir et de déchirer. Ils vont enfin pouvoir s’amuser de nouveau, et vivre librement.

Une question me vient et je m’adresse à vous, lecteurs et lectrices :

« Ça fait combien de temps que vous ne vous êtes pas assis au pied d’un arbre dans l’herbe ? Prendre ce temps-là vous est-il possible ? Avez-vous peur de salir votre manteau ? Et si le plaisir de profiter d’un moment au soleil assis dans un parc était plus grand que celui de rentrer chez soi impeccable pour se jeter sur vos écrans ? ». Voilà ce que m’a inspiré ce film en le revoyant, en me ramenant à beaucoup de questions ! Cette histoire fascinante nous parle d’apprentissage dans tous les domaines de la vie comme un chemin initiatique. Enfin ce film est avant tout une aventure musicale avec des chansons magnifiques. Avec les récentes découvertes en neurosciences auxquelles nous avons accès, il est important de choisir ce que nous écoutons, ce que nous regardons, exactement comme on choisit ce que nous mangeons ! Donnons à notre cerveau ce qu’il y a de mieux pour lui. Et ce film qui parle d’amour, de solidarité, de courage nous ouvre à l’autre et à toutes formes de différences. Alors il est temps pour tous de choisir tout ce qui concerne, et ce qu’on met en soi consciemment ou inconsciemment afin de voir ce qu’il se passe au bout d’un mois…

Voilà mon challenge que je vous lance pour ce mois-ci.

Attention ! « 1,2,3 : Changez, observez, choisissez, ouvrez-vous à toutes les différences et cherchez la vôtre afin de l’affirmer. Be Different and Enjoy ! ».

 

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